Climat : désaccords entre le Nord et le Sud sur le financement des « pertes et dommages »

Une fois encore, le monde s’écharpe sur le sujet épineux du financement de l’aide aux pays les plus vulnérables, notamment du Sud, pour faire face aux « pertes et dommages » qu’entraîne le dérèglement climatique. Alors qu’un accord de principe avait été trouvé l’an dernier à la COP27 sur la création d’un fonds spécifique, une réunion organisée sur le sujet en amont de la COP28 s’est soldée par un échec, ce samedi 21 octobre.
(Crédits : Reuters)

Chaque année, l'espoir renaît : malgré les déceptions de l'édition précédente, les fortes attentes pour la lutte contre le changement climatique ressurgissent à la veille de chaque conférence pour le climat. Mais cette année, avant la COP28 qui se tiendra du 30 novembre au 12 décembre à Dubaï, les discussions butent encore sur l'épineuse question de l'accompagnement financier des pays en développement.

Pour preuve, une réunion cruciale sur l'aide demandée par les pays les plus vulnérables pour faire face à leurs « pertes et dommages » climatiques, s'est achevée sur un constat d'échec samedi, pays du Nord et du Sud n'étant pas parvenus à se mettre d'accord, selon des sources concordantes. Frappés par les effets du dérèglement climatique (sécheresses, inondations, canicules) tout en étant les moins responsables des émissions, les pays les plus pauvres réclament pourtant un financement spécifique. Le Pakistan, par exemple, cinquième pays le plus peuplé au monde, ne représente que 0,8% des émissions de gaz à effet de serre, mais figure parmi les pays les plus menacés par les phénomènes météorologiques extrêmes.

Un accord de principe avait d'ailleurs été trouvé l'an dernier à la COP27 en Egypte sur la création d'un fonds pour compenser les « pertes et dommages » des nations du Sud vulnérables face au changement climatique.

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Mais beaucoup restait à préciser avant la prochaine COP28 : sa forme exacte, les pays bénéficiaires et les contributeurs - parmi lesquels les Occidentaux aimeraient compter la Chine. Et alors qu'un comité de transition sur l'établissement du fonds s'est réuni jusqu'à tard dans la nuit de vendredi à samedi à Assouan (sud de l'Egypte), les délégués ont constaté leur incapacité à parvenir à un accord. Ceux-ci ont ainsi renvoyé une éventuelle décision à une autre réunion du 3 au 5 novembre à Abou Dhabi aux Emirats Arabes Unis, selon une retransmission des débats disponible sur un compte officiel YouTube des Nations unies.

Dissensions sur la localisation du fonds

Le président de la COP28, Sultan Al Jaber, a pour sa part appelé samedi les négociateurs à parvenir à un accord avant la conférence de Dubaï, une étape « essentielle » selon lui.

« Je pense qu'il est possible de résoudre toutes les questions » en suspens, a-t-il affirmé dans un communiqué, en prévenant les membres du comité de transition que « les yeux du monde entier sont braqués sur vous pour parvenir à des recommandations claires, nettes et solides avant la COP28 pour mettre en œuvre le fonds pertes et dommages et la façon de l'abonder ». Et d'insister : « Des milliards de gens [...] vulnérables aux conséquences du changement climatique dépendent de la mise en œuvre de ces recommandations ».

Avant leur échec, les discussions ont notamment achoppé sur la localisation du fonds : au sein de la Banque mondiale, accusée d'être aux mains des Occidentaux, ou dans une structure indépendante nouvelle, réclamée par nombre de pays en développement, mais longue à mettre en place et complexe à abonder en argent frais.

Gouffre entre le Nord et le Sud

Cet échec « montre clairement le gouffre profond entre les pays riches et les pays pauvres », a estimé Harjeet Singh, haut responsable de l'ONG Climate Action Network qui assistait aux débats, dans un commentaire envoyé samedi matin à l'AFP.

« Il faut que les pays développés rendent des comptes sur leurs tentatives éhontées de faire héberger le fonds par la Banque mondiale, de refuser de discuter le montant des financements et de mépriser leurs responsabilités » aux termes des accords climatiques internationaux déjà conclus, selon lui.

En écho, une responsable de l'ONG « Union of Concerned Scientists » a estimé que « le résultat décevant d'aujourd'hui constitue un coup dur pour les populations [...] subissant une cascade de conséquences du changement climatique ». « Les Etats-Unis et d'autres pays riches semblent davantage préoccupés par le fait d'échapper à leurs responsabilités ou de les minimiser », a ajouté Rachel Cleetus, citée dans un communiqué de son organisation.

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(Avec AFP)

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